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Pourquoi utiliser la réalité virtuelle en éducation ?

jeudi 10 juin 2021, par M. Bertrand

Mickaël Bertrand propose une mise au point scientifique sur les apports de la réalité virtuelle en éducation.

La réalité virtuelle est une technologie qui permet d’immerger l’utilisateur dans un environnement virtuel, voire d’évoluer et d’interagir avec plusieurs éléments à l’intérieur de cet environnement. Cette technologie est aujourd’hui essentiellement utilisée dans les secteurs du divertissement, du tourisme, de l’art, mais aussi de la formation professionnelle et de l’enseignement.
Source : Pexels


Quels sont les principaux intérêts de la réalité virtuelle dans le domaine de l’éducation ?


  1. La réalité virtuelle permet de proposer aux élèves des ressources éducatives mobilisant à la fois du texte, des images, des vidéos et du son. S’il est désormais admis que les types d’apprentissage (visuel, auditif ou kinesthésique) relèvent du neuromythe, il n’en demeure pas moins que de telles ressources mobilisent tous les sens des élèves et constituent ainsi des outils intéressants susceptibles de s’adapter aux préférences et besoins des élèves.
  2. La réalité virtuelle repose sur le principe de l’apprentissage actif. L’élève est en effet invité à interagir avec un objet ou un environnement virtuel. Il s’agit d’ailleurs de l’un des principaux atouts par rapport à l’utilisation de la vidéo qui conduit souvent les élèves à adopter une attitude passive. Au-delà de la simple interaction, c’est d’ailleurs l’ensemble du corps de l’apprenant qui est sollicité dans une expérience de réalité virtuelle, réhabilitant ainsi son rôle dans le processus d’apprentissage à la lumière des travaux de Simone Weil qui affirmait qu’il est “une pince à saisir et palper le monde”. [1]
  3. La réalité virtuelle permet de confronter les apprenants à des situations qu’il n’est pas possible de reproduire tous les jours dans la réalité. C’est l’une des raisons pour lesquelles cette technologie se développe rapidement dans le domaine de la formation professionnelle. Elle permet en effet de se confronter à des situations de pilotage, de gestion de la sécurité d’un site, de mise en œuvre d’un protocole d’urgence, etc.
  4. Même si l’on associe souvent la réalité virtuelle avec une expérience narrative et un parcours interactif, il convient de préciser que la simple visualisation d’un objet en 3D replacé dans un contexte sonore et visuel constitue déjà une expérience qui présente un atout pédagogique. C’est notamment la stratégie développée par Patrick BOUCHERON dans la série Faire l’Histoire sur Arte qui considère que la mise en perspective d’un objet peut constituer une introduction efficace à la compréhension de phénomènes et concepts plus complexes.
  5. Par ailleurs, la réalité virtuelle permet d’accompagner le développement de compétences orales en situation d’entretien individuel, de présentation face à un jury ou bien de conférence devant un large auditoire (CIEKENSKI et PRIVAS-BREAUTE, 2019).
  6. Enfin, l’immersion dans des univers virtuels structurés autour d’un récit et de témoignages permet de donner accès à des phénomènes qui ne peuvent pas être transcrits par le langage (formes extrêmes de violence, expérience des réfugiés, etc.)

(voir : la réalité virtuelle au service du développement de l’empathie et des compétences sociales).


Quelles sont les principales limites de la réalité virtuelle dans un contexte pédagogique ?


  1. L’une des principales limites est associée au coût de telles ressources pédagogiques qui nécessitent non seulement l’acquisition d’un casque de réalité virtuelle, mais aussi de ressources adaptées à ces terminaux mobiles.
  2. Si les ressources liées au divertissement sont de plus en plus nombreuses, celles dédiées à un usage pédagogique restent actuellement limitées. Le développement de telles ressources constitue en effet un investissement important de la part d’industriels qui se sont pour l’instant concentrés sur des secteurs leur permettant d’envisager une forme de rentabilité.
  3. La mobilisation d’expériences de réalité virtuelle en contexte pédagogique présente également des limites proches de celles rencontrées par les jeux vidéo : elles nécessitent un temps de préparation et de mise en œuvre important qui invite à poser la question de la valeur ajoutée par rapport à d’autres ressources qui pourraient être plus simples et moins chronophages.
  4. D’ailleurs, l’élève étant immergé dans un univers virtuel, il ne peut pas prendre de notes, ce qui nécessite de réfléchir en amont à la trace écrite et aux activités proposées en accompagnement de l’expérience de réalité virtuelle.
  5. Enfin, comme d’autres ressources et situations d’apprentissage, la réalité virtuelle n’est pas forcément adaptée à tous les sujets et à toutes les disciplines. Elle est par exemple peu utile dans des disciplines qui nécessitent une manipulation concrète et une rétroaction immédiate (comme dans l’apprentissage d’un instrument de musique par exemple), mais elle peut être intéressante pour tous les apprentissages qui nécessitent une observation spatiale (géographie, SVT, chimie, etc.).

Pour aller plus loin


Devon Allcoat and Adrian von Mühlenen, “Learning in virtual reality : Effects on performance, emotion and engagement”, in Research in Learning Technology, vol. 29, 2018.

Cette expérimentation a été menée avec 99 participants qui ont été invités à utiliser des ressources de différentes natures autour d’un même thème (l’étude de cellules végétales) :
- Une partie a utilisé des manuels scolaires et autres ressources au format papier ;
- Une partie a utilisé une vidéo ;
- Une partie a utilisé la réalité virtuelle.
Les résultats des différents tests réalisés par les élèves témoignent de plusieurs atouts liés à l’utilisation de la réalité virtuelle :

  1. Une meilleure acquisition des connaissance ;
  2. Une meilleure mémorisation des connaissances ;
  3. Une meilleure compréhension du phénomène étudié ;
  4. Un meilleur engagement de la part des apprenants dans l’activité.

Sitographie


- Maud CIEKANSKI et Virginie PRIVAS-BRÉAUTÉ, “La réalité virtuelle 3D en soutien des apprentissages de langues : le rôle du contexte de communication dans les environnements immersifs”, in Education 4.1, Distances, Médiations des Savoirs et des Formations  ?, CNED, Jan 2019, Poitiers, France ⟨hal-02378652
- Claude DUSSARPS, “Le jeu vidéo pour apprendre l’histoire ?”, publié sur le site du réseau Canopé (https://www.reseau-canope.fr/agence-des-usages/le-jeu-video-pour-apprendre-lhistoire.html)
- Luc ROUSSEAU, “Non, vous n’êtes pas visuel ou auditif… Pour en finir avec les neuromythes !”, in The Conversation, publié le 12 juin 2020 (https://theconversation.com/non-vous-netes-pas-visuel-ou-auditif-pour-en-finir-avec-les-neuromythes-138889)


Mise en page pour le site académique : Angélique MARIE


[1Simone WEIL, Sur la Science, Science et perception chez Descartes, Paris, Gallimard, p. 83.